Affif DJELTI : le champion au palmarès inégalé !

81

Ne résistons pas au plaisir d’évoquer, grâce à un article de « Paris Normandie »(du 10/07/2021), le parcours et la carrière d’un fils de Harki qui fut quadruple champion du monde de boxe à plus de 40 ans, 6 fois champion de France et 3 fois champion d’Europe dans la catégorie super plume! Il a été récemment récompensé, à l’âge de 61 ans, par la médaille d’or de la jeunesse, des sports et de l’engagement associatif…

La « revanche » d’Affif Djelti, ancien champion de boxe rouennais, honoré d’une médaille à 61 ans

Affif Djelti est un ancien champion de boxe rouennais de 61 ans avec un palmarès remarquable. Bien loin de se cantonner aux étroites cordes du ring, il a mené une vie tournée vers l’autre, et s’est battu pour être reconnu. Il vient de recevoir la médaille d’or de la Jeunesse, des sports et de l’engagement associatif. 

De son costume trois-pièces nœud papillon, seules dépassent ses mains poncées par le sac de frappe – de grosses paluches façon Sean Connery – et ses médailles qu’il arbore fièrement côté cœur. Affif Djelti, ex-boxeur rouennais au palmarès rarement égalé, ne trompe pas sur la marchandise : le ring et la quête de reconnaissance, voilà ce qui l’a guidé dans sa vie. « Arriver là où j’en suis aujourd’hui, c’est une revanche sur ceux qui n’ont jamais cru en moi. »

Des trophées gagnés au prix du sang et de la sueur, cet amoureux du noble art en a eu à la pelle. Mais le 4 juillet 2021, c’est la médaille d’or de la Jeunesse, des sports et de l’engagement associatif qui lui est décernée, « une récompense pour un engagement, un travail de toute une vie », notamment auprès des jeunes des quartiers défavorisés de Rouen. Affif Djelti en a eu trois, des vies : champion de boxe, éducateur sportif auprès des plus défavorisés, et employé de mairie à Rouen ; lesquelles lui ont apporté respectivement gloire, considération, et désillusion.

« J’étais terrifié par le doute » 

Entré pour la première fois dans une salle de boxe des Hauts de Rouen à l’âge de 11 ans le jeune homme est prometteur sans briller. Il raccroche d’ailleurs les gants entre ses 22 et 28 ans. Sa carrière professionnelle ne débute réellement qu’à 31 ans. «  Je me suis pris 5 K.O. d’affilée. À l’entraînement j’étais le meilleur, mais sur le ring, j’étais terrifié par le doute.  »

Au creux de l’oreille, on lui chuchote alors : «  Affif… arrête la boxe, ce n’est pas pour toi.  » Il sera sacré six fois champion de France à 37 ans en 1996, quatre fois du monde IBO (International Boxing Organisation) Super Plume à 41 ans, et trois fois d’Europe à 43 ans, avant de partir à la retraite en 2004.

L’autre 

Fils de harki, il quitte l’Algérie pour arriver en France à l’âge de 5 ans, puis s’installe aux Sapins, à Rouen, quatre ans plus tard. « On était les premiers arabes de l’immeuble. Parfois, des gens nous lançaient des gamelles d’eau à la figure », se remémore-t-il. Réduit à sa condition « d’autre », le boxeur a fait de ce rejet un carburant de « sa revanche », sans verser dans la vengeance, puisqu’il a consacré sa vie à prouver sa valeur par le ring, et paradoxalement, à aider les autres. Il initiera par ailleurs plusieurs projets visant à promouvoir la boxe auprès des handicapés, des prisonniers, et des personnes défavorisées, dont une école de boxe à Grammont, aujourd’hui fermée faute de salle.

« Je n’aime pas perdre » 

Sur son métier d’employé municipal à la Ville de Rouen, où il travaille depuis 32 ans, Affif Djelti garde cependant une certaine amertume. « À chaque victoire, j’étais félicité de part et d’autre, mais à mon travail, rien. Je crois que je gêne. On m’a refusé une médaille du travail pour mes 20 ans d’ancienneté. » Ainsi, l’homme de maintenant 61 ans, intervenant essentiellement à la mairie du Châtelet sur les Hauts-de-Rouen, enchaîne les anecdotes teintées d’incompréhension et de ressentiment. À un an de la retraite, le puncheur garde pourtant espoir de gagner la reconnaissance de tous, car il le martèle : « Je n’aime pas perdre ».

Le combat de sa vie

C’était en 2001. Affif Djelti, alors âgé de 41 ans, s’apprête à disputer un combat hors norme. En jeu : un potentiel quatrième titre de champion du monde IBO (International Boxing Organisation) catégorie super-plume. En face de lui se tient l’Anglais Alex Moon, un boxeur de 11 ans son cadet. 

Conscient de son infériorité physique, le vétéran « gère » le combat avec intelligence et tente de conserver un équilibre. Au cours du 3e round, le Britannique tombe une première fois. Il se relève difficilement. C’est le début d’une bataille avant tout psychologique.

Le boxeur rouennais veut en finir et fait pleuvoir les coups sur son adversaire pendant le 4e round. Fort sur ses appuis, Moon encaisse, ne faiblit pas, et reprend l’ascendant. Un crochet du gauche survenu au 7e round viendra éteindre les espoirs du jeune boxeur. Il ne s’en relèvera pas. Affif Djelti n’a pas usurpé l’un de ses nombreux surnoms : « Crochet du gauche ».

Paris Normandie (10/07/2021)