Les conditions de vie quotidienne infligées aux Harkis dans les camps et autres structures de relégation ont été jugées irrespectueuses de la dignité humaine par la législation nationale et européenne.

Pourtant, il persiste encore de nombreuses blessures morales parmi lesquelles figure la question des personnes, en majorité des bébés, mortes durant leur séjour dans les camps de Rivesaltes, Saint Maurice l’Ardoise, Bourg Lastic.

A Rivesaltes par exemple, après un long combat de personnes ayant perdu un membre de leur famille, des fouilles archéologiques ont récemment pu enfin localiser un lieu d’inhumation comme l’a relaté le Journal L’Indépendant. Hélas, seuls quelques ossements ont été trouvés. Dans un domaine extrêmement codifié, comment a-t-on pu cacher aussi longtemps l’existence et la localisation précise d’un « cimetière »?

Lors d’une réunion à Perpignan, le 10 décembre, il été confirmé un bruit qui courait : les corps ont été déplacés entre 1982 et 1985 mais sans que l’on sache où ni par qui en l’absence totale de traces écrites de ce transfert caché. Comment a-t-on pu effectuer le déplacement de corps sans aucun document et pourquoi l’avoir caché si longtemps ?

En outre, Rivesaltes étant la 2ème plus importante commune du département au moment des faits, pourquoi suite à la surmortalité constatée ne pas avoir créé un vrai cimetière digne de ce nom avec des sépultures décentes permettant l’organisation d’obsèques dignes et par la suite le recueillement des familles ?

Enfin, il apparait stupéfiant au regard des compétences et responsabilités d’une collectivité locale en la matière, d’avoir autorisé ces pratiques. Avant et après les lois de décentralisation, les contrôles de légalité assurés territorialement par l’Etat n’ont pas atteint leurs objectifs. Les autorités successives chargées de l’organisation et du fonctionnement du camp ont-elles réellement rendu compte ?

Déplacer des corps sans aucun respect des procédures, sans même noter le lieu du transfert, cela s’appelle de la profanation. Lors de la réunion du 10 décembre 2024 à la Préfecture de Perpignan, entendre qu’il a été constaté des levées de corps, sans que les élus informent le Préfet ou le procureur (comme le prévoit l’article 40 du code de procédure pénale) est incompréhensible et inacceptable.

De l’avis unanime des familles de défunts membres d’AJIR, tous sont sortis de cette réunion avec déception et colère. La révélation ou confirmation de ces transferts sauvages de corps sans prendre soin de noter le nouveau lieu est extrêmement violent et source de grande souffrance autant que de colère. Désormais la question de la responsabilité de cette situation est posée. Et ce ne sont ni les motifs, ni les moyens qui manquent pour cela.

Au delà des familles directement blessées par ce drame, toute la communauté se sent touchée. Cette découverte de dépouilles d’enfants déterrés, transférés en cachette et aujourd’hui introuvables, alimente fortement ce sentiment d’injustice et de traitement de non citoyens que bien d’autres injustices ont installé depuis plus de 60 ans.

Nous connaissons la détermination et le courage des membres du « collectif des familles de disparus de Rivesaltes » dont plusieurs occupent des responsabilités au sein d’AJIR et nous avons confiance en leurs compétences et leur obstination dans cette quête de vérité. Ils mettront tout en œuvre, solidairement, pour qu’à l’avenir on sache qui étaient et où sont les morts du camp de Rivesaltes ainsi que ceux morts à l’hôpital ou à la maternité de Perpignan. AJIR soutient naturellement leur démarche qui s’inscrit dans les objectifs de vérité (information) de justice et de non discrimination entre citoyens.

Si vous aussi, vous avez perdu un membre de votre famille à Rivesaltes ou Perpignan, vous pouvez contacter l’Onac. Abderhamane Moumen, historien, ancien directeur départemental Onac a été chargé par la Directrice de l’Onac de suivre l’avancement de ce dossier. Vous pouvez aussi nous écrire et nous transmettrons au collectif.