Après leur abandon en Algérie, reconnu par loi de 2022, beaucoup de Harkis ont été emprisonnés, souvent torturés voire massacrés. Grâce à des militaires qui ont bravé les ordres d’abandon ou à la Croix Rouge internationale, quelques milliers ont pu gagner la métropole et se débrouiller seuls, sans passer par les camps ou hameaux de forestage. Ces familles sont exclues du droit à réparation alors qu’elles ont autant souffert, voire plus que celles rapatriées officiellement et passées par les camps.
Le Président d’AJIR à plusieurs reprises, comme d’autres associations, a dénoncé cette injustice. AJIR avait insisté dès le départ pour une Commission indépendante qui puisse évaluer les préjudices de chacun. Lors des débats parlementaires, grâce à un amendement proposé par AJIR, la Commission fut indépendante et rattachée au Premier Ministre. Peu après le décret de création de la CNIH, fin mars 2022, le Président d’AJIR a écrit au Président de la République pour lui demander que la CNIH tienne compte de la singularité de l’histoire des Harkis et propose des mesures de réparation pour les familles de Harkis arrivés en métropole hors plan officiel de rapatriement.
Faisant suite à notre courrier au Président de la République, la lettre de Mme Geneviève Darrieussecq, Ministre Déléguée auprès de la Ministre des Armées, à AJIR, en mai 2022, est très intéressante. La Ministre Déléguée qui portait le projet de loi précise dans sa lettre que la CNIH » pourra proposer la prise en compte de situations particulières tout comme d’éventuelles évolutions des dispositifs de soutien, de reconnaissance et de réparation en vigueur, en vue de les ajuster autant que nécessaire à la singularité de destin des Harkis. (…) la situation des personnes n’ayant pas été rapatriées pourra être examinée« .
Or, on constate que la CNIH se refuse toujours à se saisir de cette possibilité d’évaluer les préjudices de celles et ceux qui ont souffert sans passer par les camps ou autres lieux « d’accueil » officiel. Dans une émission radio (France Culture) le Président d’AJIR avait qualifié l’attitude de la CNIH de « frileuse ». C’est peu dire! Puisse le prochain rapport (qu’on attend depuis avril 2024) nous faire mentir et contenir, enfin, des propositions audacieuses pour davantage de justice.